
Depuis la fin du Moyen Âge, chaque foyer conservait tout au long de l’année la cendre des ceps et sarments de vigne dont la forte teneur en potasse possédait d’incomparables vertus nettoyantes. La cendre était placée dans un sac au fond d’une cuve nommée ponne, aujourd’hui reléguée au rang de jardinière. Les meilleures ponnes en céramique de Saint-Eutrope-de-Montmoreau ou de Benest avaient, dit-on, la particularité de sonner comme des cloches.
Le linge était placé à l’intérieur des cuves avec quelques feuilles de laurier pour le parfumer. La bujhée débutait, faisant passer le linge de l’enfer (une journée dans l’eau bouillante de la ponne) au purgatoire (une nuit de repos), avant le paradis (le retour au blanc immaculé). Le linge était ensuite rincé au lavoir où régnait une stricte hiérarchie féminine. Les ragots allaient bon train et la main était leste à manier le battoir sur le linge ou sur une voisine désagréable, comme le rapportent nombre d’archives judiciaires.
À partir du XVIIIe siècle, ces lieux d’hygiène publique se multiplient joliment. Quand le point d’eau est éloigné, la commune installe des timbres près d’un puits. Or la fontaine du lavoir de Roissac est ici reliée à sept timbres par un aqueduc de pierre. Chacun servait soit à abreuver les bêtes sans qu’elles n’aient à s’approcher trop près du bassin de lavage soit à rincer le linge à l’eau claire. Mais la curiosité n’est ici pas seulement utilitaire, elle est aussi mythique !
La légende raconte que François Ier enfant tomba dans le trou rempli d’eau qu’était au XVIe siècle cette fontaine. Trébucha-t-il alors qu’il s’essayait à la bujhée ? Rien n’est moins sûr. Mais l’on peut s’attarder à imaginer le passage du futur grand roi par ce bourg alors sur les terres de son domaine cognaçais…